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Les choix du toiletteur

Oublions pour l’instant les races pour lesquelles leur standard recommande un travail par coupe ou tonte (très précisément, il s’agit des races suivantes : Caniche, Kerry blue terrier, Bedlington terrier, Soft coated wheaten terrier, Barbet, Chien d’eau portugais, Petit chien lion, Bichon frisé dans les pays anglo saxons, et pour partie seulement, Cocker américain).

Pour toutes les autres races, je dis bien toutes, le poil devrait être conservé long, ou raccourci par le seul moyen du trimming. Cela vaut bien donc pour l’ensemble des poils longs, qu’une mode étrange, commencée avec les Yorkshire terriers, puis étendue peu à peu à de plus en plus d’autres races, tend à vouloir dénaturer vers un modèle commun, vaguement – et malencontreusement – inspiré de certaine coupes caniches, et copié par un nombre réellement significatif de salons de toilettage.

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 Tout cela est bel et bon, me dites-vous, mais l’intérêt économique du toiletteur dans tout cela ! À bien « servir » la réalité physiologique du pelage, ne se met-il pas sur la voie de la ruine, ou tout au moins sur celle d’un surcroît assuré de travail, surcroît bien difficile à valoriser ?

Pour le dire encore plus trivialement, les intérêts du poil et ceux du toiletteur ne sont-ils pas à l’opposé l’un de l’autre ?

Oh, je veux bien vous le concéder, pour ce genre de toilettages, et pour le court terme, vous n’aurez pas toujours tort : votre tondeuse, vos ciseaux, iront peut-être très légèrement plus vite que mes moyens.

Mais, faut-il le rappeler : pour une entreprise durable, le court terme n’est pas un objectif, mais un piège !

En effet, lors d’un premier toilettage, une coupe « aux ciseaux » pourra donner l’impression de coûter moins de peine et moins de temps qu’un démêlage ou qu’un trimming. Mais dès le prochain rendez-vous, la situation se trouve totalement inversée. Votre poil coupé, à la qualité détériorée, se présente emmêlé, sans tenue, exigeant un démêlage préparatoire difficile et épuisant ; la coupe sur un tel poil : toujours plus délicate, un résultat toujours moins convaincant ! Tandis que dans mon cas, le pelage a pris de la fermeté, de la vigueur ! Désormais, mon travail est beaucoup plus facile et beaucoup plus confortable que le vôtre !

Et pas d’illusions ! L’injustice entre nos deux solutions ira grandissant : de toilettage, en toilettage, vous allez souffrir de plus en plus, et moi, de moins en moins !

Voilà qui vous explique plus que longs discours pourquoi la profitabilité de deux salons affichant le même chiffre d’affaires peut varier de… un à deux ! Le court terme, la tonte, la coupe : des menteurs ! La voie royale vers une profitabilité toujours réduite ! Des toilettages de plus en plus délicats, difficiles, chronophages… Tandis que de mon côté, je travaille tous les jours, de plus en plus facilement, de plus en plus agréablement ! Votre profitabilité s’effondre, la mienne ne cesse d’augmenter.

Je comprends très bien que vous ayez de la peine à me croire, lorsque je soutiens, qu’un poil conservé long vous coûtera toujours moins de peine que le même poil plus oui moins raccourci ! Le « bon sens instinctif » porte à croire que ce n’est pas possible, je le reconnais bien volontiers ; mais essayez-le, vous le constaterez, l’expérience conduit à un constat sans appel.

J’ai raconté ailleurs cette observation que nous avions faite, du temps que notre école de toilettage comptait parmi ses étudiants… une petite double douzaine de grands caniches ; puis-je mieux faire que citer notre conclusion (Le Toilettage au Bout des Doigts) ?

« … nos chiens étaient entretenus, on s’en doute par les élèves de notre école. La plupart étaient toilettés en peluche ou scandinave, quelques-uns n’étaient pas toilettés (raccourcis). On le devine, les chiens les moins « volumineux » étaient ceux mis en peluche, venaient ensuite les « Scandinaves », pour finir par les sujets non toilettés (poil conservé long sur tout le corps). Tous les chiens étaient baignés deux fois par semaine. La nature humaine étant ce qu’elle est, nos élèves, on s’en doute, ne se battaient pas pour les bains, et donc les défrisages, les plus difficiles : la logique eut voulu que les « peluches » fussent donc choisies en premier, et les chiens aux fourrures les plus longues considérés comme une sorte de brimade. Hé bien, c’est exactement le contraire qui se produisait, et nos apprentis toiletteurs avaient tôt fait de repérer de quel côté pesait la balance du moindre effort ! Ce n’est pas les poils les plus courts, mais tout au contraire les plus longs, que l’on se disputait ! »

Les personnes qui élèvent des caniches pour les concours le confirmeront : si le manteau est réellement conservé (c’est-à-dire rigoureusement préservé de l’usage intempestif des ciseaux), c’est cette partie qui se révèle la plus facile à entretenir, et dont le séchage-défrisage prend le moins de temps. Les parties raccourcies (membres, dos) présentant beaucoup plus de difficultés, et demandant plus de temps. Les Américains, hommes de l’art en matière de poils longs, ne s’y trompent d’ailleurs pas ! Dans ces pays du lobbying, les handler professionnels savent s’entendre pour ménager leur peine, et faire interdire dans les expositions les présentations de type « scandinave » : « beaucoup trop de travail » vous confient-ils, sous leur tablier de toilettage, à défaut d’un manteau…

Un travail plus facile, donc ! Mais aussi beaucoup plus agréable, et conduisant, c’est incontestable, à un niveau beaucoup plus élevé de satisfaction professionnelle !

Avec une autre différence, de taille, celle-là, et sur laquelle nous allons revenir, mais que je signale par avance : c’est qu’avec votre tondeuse et vos ciseaux, vous vous installez sur un marché littéralement empêtré de concurrence ! Ce que nous allons découvrir à présent, et c’est là tout le paradoxe de notre métier, est que ce n’est pas du tout mon cas ! Disons-le clairement, après un certain temps, non seulement mon travail sera beaucoup plus facile que le vôtre, mais comble d’injustice, je serais à même de défendre mes prix beaucoup plus facilement que ce ne sera votre cas ! Voilà qui vaudra la peine d’en sérieusement reparler…

Pour un toilettage intelligent, par Michel Georgel

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One Response to Pour un toilettage intelligent (page 7)

  1. Géraldine George-Batier dit :

    Intéressant!

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