Cet article est la suite de Pour un toilettage intelligent (page 2) : les fondamentaux du toilettage

La fourrure, ça marche comment ?

Répétons-le : ce n’est pas directement que le poil protège l’animal des variations de température de son environnement ; en effet, la kératine, son principal constituant, est un excellent conducteur de la température, ce qui ne la qualifie pas du tout pour jouer quelque rôle de protection thermique que ce soit. C’est donc une autre qualité de cette kératine qui est mise en œuvre ici : sa rigidité ! Cette rigidité, combinée à une certaine densité du pelage, détermine un volume d’air stable autour de l’animal, dont la température est intermédiaire entre celle de la température du corps et celle du milieu environnant : ce rôle de « tampon thermique » justifie pleinement la dénomination couramment employée de « matelas thermique » ou plus simplement « matelas d’air ».

On conçoit facilement que pour deux pelages de nature identique, la meilleure efficacité sera atteinte par celui qui déterminera le volume d’air le plus important. Les facteurs limitatifs de ce volume pourront être :

  • la présence de salissures ou de tout corps étranger,
  • toute forme d’emmêlement,
  • un poil trop « plaqué » sur la peau, par suite par exemple d’un séchage naturel après une exposition à l’eau ou même à l’humidité.

Au contraire, un pelage débarrassé de toute souillure, auquel on aura donné un maximum de gonflant, se révélera par nature à l’apogée de sa capacité de protection.

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L’hydrogène ou le secret du brushing

Mais disposons-nous réellement des moyens de faire gagner de l’épaisseur à une fourrure ?

La réponse tient dans l’observation de la structure même de la kératine. Nous avons souligné ci-dessus la rigidité de cette dernière. Mais l’affirmation de cette propriété n’est pas tout à fait exacte, elle se trouve même contredite dans certaines circonstances particulières : c’est ainsi que trempée dans un liquide, elle présente au contraire la plus grande flexibilité.

C’est qu’une observation au microscope montrerait que la kératine se présente en réalité sous forme d’hélices parallèles, ou caténaires, d’une grande souplesse. Ce qui maintient l’ensemble sont des liaisons entre les caténaires (liaisons intercaténaires) et à l’intérieur de chaque caténaire (liaisons intracaténaires). La plus puissante de ces liaisons, celle qui confère toute sa « rigidité » au pelage, est une liaison intracaténaire, la liaison « hydrogène ».

Cette dernière liaison présente deux caractéristiques dont nous allons découvrir que leur combinaison peut se révéler tout à fait intéressante.

La première est d’être très sensible à un environnement liquide, au point d’y disparaître à peu près complètement : voilà pourquoi un cheveu ou un poil mouillé deviennent aussi malléables ! La seconde est que la liaison se reconstitue au moment précis de l’évaporation de l’eau qui l’entoure, conservant alors au poil (ou au cheveu) la forme exacte qu’il a à ce moment.[1]

(Certes, ce phénomène présente une durée plus ou moins éphémère, la liaison hydrogène reprenant une forme originelle après un certain temps : voilà pourquoi, Mesdames, vos brushings comme ceux de nos chiens, ne durent pas toujours…)

Si donc, au moment de l’évaporation, le poil se trouvait tendu, raide, aussi perpendiculaire à la peau que son implantation le rend possible, c’est cette forme qu’il conservera au moins un certain temps. Et si tous les poils d’une même fourrure se trouvent dans cette même situation, on atteindra, vous le devinez, le volume optimal d’air que cette fourrure peut retenir.

À l’inverse, on comprend mieux pourquoi un brushing négligé, ou laissé au hasard d’une évaporation naturelle ou plus ou moins forcée, par exemple dans une « cage de séchage », produira le résultat inverse : un poil resserré sur la peau, une fourrure présentant un volume minimal, et donc une efficacité considérablement amoindrie. On peut toujours, par coiffage, redonner une sorte d’épaisseur à une telle fourrure ; la souplesse naturelle des poils le permet ; mais il faut bien comprendre que ce résultat est très éphémère : en moins de quelques minutes, les liaisons hydrogènes auront fini d’agir et redonneront aux poils les formes prises durablement au moment de l’évaporation.

Voilà pourquoi on peut affirmer que du point de vue de la physiologie du pelage, comme du bien-être animal, le brushing est à considérer comme l’acte central de toute opération de toilettage intelligemment réfléchi. (Le bain, en lui-même, n’ayant en réalité d’autre objectif que de rendre possible cette meilleure qualité de brushing.)

C’est là un point fondamental : on s’imagine en général que le but principal d’un brushing de qualité est la recherche d’un certain aspect esthétique. Mais du point de vue du toilettage intelligent, l’esthétique est donc une conséquence, et pas du tout un objectif prioritaire.[2]

Pour un toilettage intelligent, par Michel Georgel

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[1] On notera ici que certaines « croyances » concernant les poils durs se trouvent ici définitivement démasquées : non, les « bains » ne sont pas susceptibles d’amollir les poils durs, sinon pendant la durée du contact avec l’eau, mais ni plus ni moins que pour tous les autres poils ; dureté « récupérée » intégralement au moment de la reconstitution de la liaison hydrogène.

[2] Le fait qu’une fourrure mise en situation de protection thermique maximale corresponde en effet à l’aspect esthétique optimal est une coïncidence que l’on peut qualifier d’heureuse, mais qui n’en reste pas moins une coïncidence. S’il se trouvait une opposition esthétique-bien-être animal, le toilettage intelligent choisirait le bien-être, sans le moindre état d’âme.

 

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